Jean-Marc Guillou n’a pas changé. A 65 ans, l’élégance caractérise toujours cet artiste du dribble et du joli football qui a fait les beaux jours du SCO d’Angers (1966-75) puis ceux de l’OGC Nice (1975-79). Après sa carrière de footballeur, l’ex-international est ensuite devenu entraîneur notamment à Cannes (1983-85) avant de partir former des jeunes en Côte d’Ivoire, puis à Bamako (Mali) où son entreprise JMG Football est basée. De retour à Nice pour revoir ses deux filles et pour un check-up, Jean-Marc Guillou nous parle football… près des courts du Parc-Impérial où il accompagnait sa fille Sarah et son gendre, le neuro-chirurgien niçois Bernard Massini.
Votre présence à Nice ?
Je suis à Nice car mes deux filles, Sarah et Stéphanie y habitent. Nice n’est pas un endroit désagréable… Souvent, à nos âges, on vient en France pour faire des check-up et j’ai désormais des prothèses au genou. J’en profite pour me faire un peu réparer. La France est un beau pays. Cela dit, il ne respire pas la joie de vivre. Paradoxalement, quand je suis en Afrique, je vois plus d’enfants qui sourient qu’ici. Quelquefois, ceux qui n’ont pas grand-chose sont quelquefois plus proches du bonheur que ceux qui ont beaucoup. L’idée de faire avancer ces pays en voie de développement n’est pas une mauvaise chose.
Suivez vous le parcours de l’OGC Nice ?
Je ne l’ai pas vu jouer cette saison, donc je ne peux pas en parler. Je vois que les Niçois ont des débuts un peu difficiles, ça arrive. L’année dernière, ils ont frisé la correctionnelle, c’est la preuve d’un club qui n’a pas encore trouvé ses marques. Je pense que, cette année, ils peuvent éviter la descente car il y a des équipes comme Ajaccio, Dijon, Evian ou Nancy qui sont plus faibles.
De bons souvenirs en rouge et noir ?
J’ai passé quatre ans à Nice. D’une manière générale, ce sont des bons souvenirs. D’une part parce que j’étais jeune, ensuite parce que c’est un plaisir de jouer et que c’était dans des conditions sympas. Donc, ça peut donner un peu de nostalgie. Mais je dois reconnaître que ce ne sont pas les années les plus riches de ma vie.
« Mes années les plus riches sont celles passées en Côte d’Ivoire »
Quelles années ont été les plus riches ?
Celles passées en Côte d’Ivoire, de 1993 à 2001 où j’ai réalisé le projet de former des gamins. J’ai eu du bonheur à voir jouer ces jeunes. J’ai formé des joueurs qui composaient 80 à 90 % d’une équipe qui est allée deux fois en Coupe du monde. Ensuite, beaucoup de joueurs ont joué en Ligue des Champions en Europe. Et ces joueurs auraient dû à mon sens gagner plus de titres s’ils avaient été mieux employés. Ils sont allés en coupe du monde, à la CAN, mais ce n’est pas suffisant.
Quels joueurs avez-vous formé ?
Je peux citer Yapi, Boka, Eboué, Kolo et Yaya Touré, Kalou, Zokora, Aruna, Gervinho, Baky Koné, Tiéné, Copa, Tony, Zézé, Romaric, etc.
Qu’avez-vous fait après ?
En 2001, j’ai pris le club de Beveren (Belgique) jusqu’en 2006. J’ai alors relancé la formation des jeunes à Bamako (Mali) en 2007 et j’ai trouvé des partenaires en Algérie, en Egypte, en Belgique, au Ghana, à Madagascar, en Thaïlande et au Vietnam : dans ces trois derniers pays, nous sommes en tête du championnat et à Madagascar, nous avons 14 ou 15 internationaux.
Votre fonction ?
Je suis président de JMG Football, société basée à Bamako, qui gère toutes ces académies. Je me suis entouré de gens compétents. Nous proposons des expertises au niveau de la formation et du consulting auprès des Fédérations africaines et asiatiques qui ne sont pas des modèles de gestion.
En Afrique et en Asie, le football est un peu sinistré. J’ai le sentiment qu’il y a vraiment beaucoup de choses à faire. Ils prennent les règles FIFA à défaut d’autre chose. Mais ces règles ne sont pas du tout adaptées à l’Afrique. Il faut aussi repenser l’arbitrage en Afrique qui est une calamité. Dans tous les pays africains, le sport No1 c’est le football. Mais c’est une activité qui ne rapporte rien. Les clubs n’ont même pas le budget de CFA 2 en France. Pas de droit télé, pas de sponsors, les fédérations ne sont pas sérieuses.
C’est un manque de moyens ?
Il faut surtout avoir des idées. Moi, j’ai une formation qui est complètement différente. On joue d’abord à 5, 6, 7 et on joue pieds nus car c’est la meilleure formation. Tous les gestes sont plus rapides. Ne serait-ce que 800 grammes à chaque pied, c’est lourd. Il faut faire des économies d’énergie. Et lors des matches, il n’y a pas de blessés. Ce n’est pas le costume qui fait le footballeur, c’est le jeu.
RECUEILLI PAR PIERRE BROUARD, Nice matin le 16 octobre 2011