Malgré un statut fragilisé en club, Kolo Touré reste un élément indispensable de la sélection ivoirienne.
Le 21 janvier, débutera au Gabon et en Guinée équatoriale la Coupe d’Afrique des Nations (CAN). Favoris de la compétition, les Eléphants de Côte d’Ivoire pourront une nouvelle fois compter sur leur défenseur Kolo Touré.
Kolo l’Invicible
Comme bon nombre de talents ivoiriens, le joueur débute sa carrière au sein du club abidjanais de l’ASEC Mimosas. Avec cette équipe, le défenseur remporte trois titres de champions de Côte d’Ivoire (2000, 2001, 2002) et la Super Coupe d’Afrique. A 21 ans, Touré s’envole pour l’Europe.
En 2002, Arsène Wenger, coach du club anglais d’Arsenal repère le jeune défenseur. A l’époque, les Londoniens culminent au sommet du football britannique. Kolo Touré s’engage avec la prestigieuse formation et s’intègre rapidement.
Avec l’Anglais Sol Campbell, il compose l’une des plus solides défenses de la Premier League (championnat anglais). Face aux attaquants des équipes adverses, Kolo Touré se montre impérial dans les duels. À l’issue de l’exercice 2002-2003, il remporte sa première Cup (coupe d’Angleterre).
2004 est une année historique pour le club. Arsenal finit champion d’Angleterre sans avoir perdu le moindre match. Les Gunners sont surnommés les Invincibles. Auparavant seul le club de Preston North End FC était parvenu à réaliser cette performance, c’était en 1889.
Les Londoniens remportent également le Community Shield, match opposant le champion d’Angleterre au vainqueur de la Cup. En 2005, Kolo Touré remporte sa deuxième coupe d’Angleterre.
C’est le dernier trophée d’Arsenal. Depuis, le club londonien n’a plus rien gagné. En 2008, les Gunners domine le championnat durant une bonne partie de la saison mais c’est le Manchester United de Wayne Rooney qui termine champion.
Manchester City, le club qui monte
Lassé du manque d’ambition d’Arsenal, Kolo Touré cède aux sirènes du club qui monte: Manchester City. Au cours de l’été 2008, le club est racheté par un fonds d’investissements d’Abou Dabi. L’objectif des nouveaux propriétaires est simple, ces derniers souhaitent, à court terme, hisser Manchester City au rang des clubs les plus prestigieux d’Europe.
Et pour cela, Khaldoon Al Mubarak, le nouveau président, n’hésite pas à sortir le chéquier. Durant le mercato 2009, le club s’attache notamment les services de la star argentine Carlos Tevez, qui n’hésite pas quitter les Red Devils de Manchester United, rival historique, et Emmanuel Adebayor, attaquant d’Arsenal. Côté défense, Kolo Touré fait partie des recrues.
À son arrivée à City, l’Ivoirien n’hésite pas à critiquer la politique de son ancien club.
«Je suis venu à Manchester City parce que si vous regardez Arsenal, vous verrez que tous les grands joueurs ont désormais quitté le club et appartiennent au passé.Thierry Henry est parti, Patrick Vieira est parti, Ray Parlour est parti. Ces joueurs sont ceux qui ont apporté le succès à Arsenal, et il m’a semblé qu’il était aussi temps pour moi de passer à autre chose. A Arsenal, nous avons perdu trop de meneurs. La seule manière pour les meilleures équipes d’être au sommet est de disposer des meilleurs joueurs, et pour avoir ces joueurs, il faut dépenser beaucoup d’argent. En football, on ne peut pas réussir sans argent. C’est la nature de ce business.»
Les débuts de Touré sont plus que prometteurs. Le défenseur hérite du brassard de capitaine dès son premier match. A la fin de la saison, Manchester City finit cinquième du championnat anglais. Durant le mercato 2010, le petit frère de Touré, Yaya, quitte le FC Barcelone et rejoint son aîné chez les Citizens. Lors de la saison 2010-2011, le club mancunien, toujours plus fort, finit troisième du championnat et intègrent le Big Four (groupe composé des quatre premiers clubs du classement). Les hommes de Roberto Mancini, coach des Blue Sky, remporte même la Cup, grâce un but de Yaya Touré. Le dernier titre de Manchester City remontait à 1976.
Les Citizens poursuivent leur ascension et semblent inarrêtable. Mais si, sur le plan collectif, 2011 a souri aux joueurs de City, Touré a probablement vécu la pire année de sa carrière sur le plan personnel.
2011, une année noire
En mars 2011, au cours d’un test mené par l’Agence mondiale antidopage (AMA), Kolo Touré est contrôlé positif. Le défenseur nie avoir eu recours à des produits dopants. Ce dernier affirme avoir ingéré un produit amincissant de sa femme, un produit qui contient un composant interdit par l’AMA. En mai, Touré est suspendu pour une durée de six mois par la fédération anglaise de football.
De retour de suspension, le défenseur ne retrouve pas la place qui était la sienne. Le brassard de capitaine lui a été retiré et le joueur est très peu utilisé par Mancini. En novembre, son club lui inflige une amende correspondant à six mois de salaire.
Au début du mois de décembre, Touré n’est apparu qu’à quatre reprises dans le championnat anglais. Insatisfait du traitement qui lui est réservé, l’Ivoirien se répand dans la presse, affirmant être victime de discrimination du fait de ses origines africaines.
Une théorie peu crédible quand on connaît le rendement de Yaya Touré. Titulaire indiscutable, le Joueur africain de l’année 2011 est l’un des mancuniens les plus utilisés par Mancini. Barrés par les défenseurs Joleon Lescott et Vincent Kompany qui composent la charnière centrale, Kolo Touré ne semble pas opposé à un départ de Manchester City.
En décembre, le défenseur se disait intéressé par un nouvau challenge au Paris Saint-Germain. C’est ce qu’il affirmait au magazine France Football :
«Aujourd’hui, le PSG est un grand club, comme City, Arsenal ou Milan, qui a envie de devenir l’un des meilleurs du monde et qui investit sur des grands joueurs. Forcément, ce n’est pas négligeable. Je ne connais pas un joueur qui refuserait le PSG».
La situation de Kolo Touré est fragile à Manchester City, mais le défenseur reste un pilier de son équipe nationale.
Un pillier de la sélection
Dans la seconde moitié des années 2000, l’équipe nationale de Côte d’Ivoire a «explosé» au plus haut niveau. Sous l’impulsion de Didier Drogba, le capitaine, et de joueurs comme Touré, les Eléphants ont permis à la sélection ivoirienne de figurer parmi les plus grandes équipes africaines du moment. Au dernier classement FIFA, la formation termine à la 16ème place du classement, c’est la première du continent noir. En 2009, les deux leaders créent l’Association des footballeurs ivoiriens (AFI) dans laquelle ils occupent des postes de vice-présidents. Les deux internationaux souhaitent venir en aide aux footballeurs de leur pays.
«Nous n’agissons pas pour la gloire, nous n’agissons pas pour que l’on dise du bien de nous, nous agissons parce que nous sommes conscients des réalités quotidiennes auxquelles les footballeurs ivoiriens sont confrontés», a déclaré Drogba.
«Nous ne partons pas en guerre, nous voulons juste faire entendre notre voix et, par le dialogue, faire évoluer positivement les choses et le statut du footballeur professionnel dans notre pays».
Dans les années 2000, Touré a participé à toutes les campagnes de la Côte d’Ivoire. Le défenseur fait partie d’une génération de joueurs ivoiriens pétri de talent, qui, depuis une dizaine d’années, s’illustre dans les grands championnats européens et fait la joie de la sélection ivoirienne.
En 1993, le Français Jean-Marc Guillou crée en Côte d’Ivoire une académie en partenariat avec l’ASEC Mimosas pour repérer les jeunes talents du pays et les encadrer. Didier Zokora, Aruna Dindane, Romaric, et plus récemment Salomon Kalou ou encore Gervinho, de nombreux Ivoiriens sont passés par ce centre de formation. Touré intègre l’académie Jean-Marc Guillou en 1994.
À la fin des années 90, la première promotion fait ses débuts dans l’équipe première de l’ASEC Abidjan. En 1999, le club abidjanais joue la Super Coupe d’Afrique, compétition opposant, à l’époque, le gagnant de la Ligue des Champions de la CAF (que l’ASEC a remportée en 1998) au vainqueur de la Coupe d’Afrique des vainqueurs de coupe (cette dernière compétition disparaît en 2003 pour fusionner avec la Coupe de la CAF et former en 2004 la Coupe de la confédération).
Les protégés de Jean-Marc Guillou découvrent le haut niveau lors de ce match. Et pour leur première sortie, les jeunes joueurs impressionnent. Touré, qui n’a que 19 ans, est intraitable en défense.
L’ASEC remporte la Super Coupe, et l’Afrique découvre une partie des joueurs qui, plus tard, contribueront au succès de la sélection. Dans les années 2000, les «académiciens» investissent les grands championnats d’Europe (Angleterre, Espagne, Italie, Allemagne, France) et sont naturellement sélectionnés en équipe nationale. Ainsi, en 2006, dans la liste des 23 joueurs sélectionnés pour la Coupe du monde, on retrouve 11 joueurs issus de l’académie Jean-Marc Guillou.
Kolo Touré fait partie des aînés de cette génération. Pour le joueur de 30 ans, la CAN 2012 constitue l’une de ses dernières chances de remporter un titre avec son équipe nationale.
Jacques-Alexandre Essosso, www.slateafrique.com